dimanche, juillet 26, 2009

Souder les foudres

Grande Allée un samedi matin. Ça boume encore sous le ciel d'étoiles fictives. Des corps en sueur, mi-nus sur le linoléum battu. Tes rayons s'expriment en faisceaux larges et tu trembles dans l'eau froide et la brise des haut-parleurs. J'ai la tête enserrée d'un ruban blanc, mon regard erre au ciel par-delà le manteau d'effroi lumineux. Des rigoles le long des plaines astrales; on n'imaginait pas tant de reliefs à l'exil.

Cela baigne, cela nage. Chacun s'invente son propre bain de solitude. La ratine sur le lino, imbibée, vautrée dans le jus d'existence. Déchet. Rebut. Tu t'imprègnes de l'ère. Je me saoule à la honte maîtrisée. Nous battons le rythme en éclaboussures.

De lin, de denim dévêtus; nous sommes tous de sombres orages silencieux. Les déjections tempêtent, burlesques. Coupez l'alimentation. Disjonctez les circuits, délabrez le décor, laissez la plaie suppurer; les pleurs rejoindre la sueur; l'eau-de-vie, la mort aux rats.

Nous panserons demain Grande Allée, et mutilerons nos corps. La soudure éclatera, ce sera notre baume.

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encore un qui a l'air d'une scène de sexe. Mais non! refaites vos devoirs, c'est pas de ça que je cause!

Sans manifestation

Pleure, Wurlitzer!
Pleure, tu n'en larmoieras guère.


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Ha! Ha!
C'est si niais que j'en pleure aussi!

vingt-six zéro sept

un chapeau gris sur des rouages encrassés
la terre vivote dans son aquarium
Salinger nous économise
on lui chante des odes

Au gérondif, on croirait
en balayant les nuages les regards la foule
Un brouillard ne se dissipe jamais
Cela me deut que cela me deule

Mars est en jupiter
Je suis en calvaire

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nda: je le laisse parce que je ne peux m'empêcher de trouver ça drôle d'avoir écrit ça. Mais on dirait «je suis en calvaire» comme «je suis en colère», alors que c'est plutôt de la butte des crucifiés dont il est question. Quoi qu'il en soit, c'est un mauvais texte. Mais ça ne sera pas le dernier!

jeudi, juillet 23, 2009

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samedi, juillet 04, 2009

Exit. 4

Tu sais pas
L’irrésistible chaos
L’univers clos qui nous sous-tend
L’infinité de l’orient quand les samuraï dansent
Autour du bûcher de Salem
Et les patriotes qui frappent leur gong
En traçant des hiéroglyphes
Tu sais pas,
tu sais rien de tout ça


Tu sais pas
Lorsque la casbah s’écroule
Sur la tête des jésuites
Qui nous menacent d’une vérité cuite
Au bouillon sous la crémaillère
Les couleurs de l’aurore boréale
Sur le ciel d’ambre calcinée
Tu sais pas,
tu sais rien de tout ça


Tu sais pas
Les rigoles le long de tes propres omoplates
Que font rougir les baisers désinventés
Que j’exerce tous les soirs en rêvant de goulags
Où me perdre avec toi

Tu sais pas
Tu sais rien de tout ça.

Wanna quit?
C’est par là.

vendredi, juillet 03, 2009

Exit. 3

Tu sais pas
Combien la douceur est abjecte
Et la redondance de la luxure
Et l’abondance que j’objecte
Et les regards de l’usure
Et la peau doucereuse qui s’éprend
Et ton corps qui ruisselle
Et ta paix, et ton doute de polichinelle

Tu sais pas l’ennui
Du regard des épris
Des hameçons que tu me harponnes dans la gueule
En me faisant une fleur comme un bouffon ferait de ses caoutchoucs

Tu sais pas l’abandon
Comme il me désole
Comme la simplicité est mordante
Chaque fois que tes yeux ne me percent pas
Et que rien de toi ne me touche que ton sexe
Et la pâmoison qui détrempe les draps,
Les vicissitudes dans l’air où tu me crois vicieux
Des éperviers revanchards

Tu sais pas.
Tu sais rien.
Opiniâtre inculture
T’as les yeux pleins
Et moi le cœur vide
Tu baves, tu craques, tu chancelles
Et tu rigoles d’être belle
Mais comme tu es laide au fond
Là où l’on sombre si tôt.

Tu sais pas
Tu sais rien de tout ça

Wanna quit?
C'est par là.

jeudi, juillet 02, 2009

Dansité

On dit que je suis dense. Moi je dis que je danse. L’un et l’autre sont faux. Si le rapport massique d’un être, ou de son propos, si seulement on savait bien le soupeser, entretient quelque corrélation avec la matière brute qu’il contient, si le mouvement d’un corps inerte dans l’espace est aucunement rattaché à l’expression, brute aussi, de cette matière; si, encore, la lettre – elle seule – qui distingue un concept d’une vie, un phénomène, d’une expression de vie, la contention, de l’incontinence, n’est en fait qu’un seul caractère, qui prétend à s’élever plutôt qu’à s’affaisser, rien ne nous autoriserait pour autant à en faire un critère discriminant, entre l’un, et l’autre.

Lourd? Dense? De l’ordre de ce qui nous surprend quand nous essayons d’y prendre prise. Une caisse de livres. Une caisse vide. Un caisson. Une encavure. Une alcôve. Un chien qui s’y réfugie. Un bouvier bernois, blessé. Qu’a-t-il? Je ne sais. Pas. Du sang. Du sang de chien, chaud, qui s’écoule, laissait une trace, sur le sol, à chaque pas qu’il a fait pour aller se recroqueviller, sans pleurnicher, dans un terrier inventé. Sang qui croûte sur son poil. Un peu de lui qui existera là, jusqu’à ce que la pluie le délave, là sur le sol qu’il a foulé. C’est une partie de son existence, qui s’étend, du lieu de la blessure jusqu’au nid de sa mort.

Ce ne sont pas tant d’indices de son passage, tant de salissures sur le monde aseptisé qu’il arpente, ce sont, chacune de ces souillures de sang, chaud, puis froid, ce sont des témoignages. C’est la matière dont il était constitué qu’il laisse derrière lui, qu’il répand sur le monde. Avant de s’en éclipser. On verrait, çà sur le trottoir, un rein, là devant une porte, une canine, ici, sur votre pied, son cœur, il en serait la même chose : un bouvier bernois qui meurt.

Une pièce de casse tête laissée à l’abandon sur le tapis, ou une autre pièce déchiquetée, retrouvée en poussière dans un cendrier, ça demeure un morceau manquant, une tuile arrachée, un pixel noir sur l’image.

Au chien, dans l’alcôve, il manque des tuiles. Est-il moins canin tant qu’il n’en meurt pas? Et s’il crève au bout de son sang, on n’en dira pas moins de son cadavre que c’est un chien. Mort.

Ainsi je crois que l’on meurt peu à peu. Que l’on perd du sang, témoignage de chaque souffrance, tout au long de la vie. Que les pièces, une à une, sont perdues et nous demeurons des casse-têtes aussi longtemps que l’on reconnaît une image. Après quoi nous dirons « c’était un puzzle ». De certains, un peu plus fortunés, « c’était un joli puzzle ».

-- Un sale casse-tête, ce mec. Ça m’a pris des jours pour parvenir à le faire. Maintenant il est trop incomplet.

Dense? Lourd? Ce qui contient beaucoup. Une image impressionniste, toujours, aux couleurs innombrables. L’impression d’un relief, et quelques faux-semblants. Le chien dans l’alcôve est-il mort? Le voit-on respirer, le perçoit-on remuer, de douleur, la queue, bouger une patte de derrière? L’entend-on râler, tandis que la mare de sang dans laquelle il baigne s’étend. Se densifie.

Inutile, désormais, de lui apporter quelque soin. Sans objet. Caduc. Un peu de tempérance, peut-être, pour alléger sa souffrance, un départ. Vainement. Toutefois nous pourrions, un court moment, ou pour des années, ou jamais, danser. Danser pour lui, danser pour nous. Tanguer sur la houle qui se forme à la surface d’un océan de sang noir.